925 - La mythologie en tant que moteur social

N. Lygeros

Bien que la sociologie se donne pour but de comprendre le comportement social, il faut admettre qu’elle n’est pour le moment en tout cas, capable de comprendre celui-ci qu’a posteriori. Le milieu de l’union européenne est un exemple suffisamment large pour atteindre une certaine généricité qui permette d’affirmer que la sociologie n’est pas encore au stade de la prévision. Il faut que celle-ci concerne des exemples élémentaires et/ou extrêmement massifs pour qu’elle parvienne à son domaine. Malgré cela la sociologie tente par bien des moyens fallacieux de convaincre la société qu’elle la comprend. Même si nous ne partageons point cette opinion, ici il nous importe de rechercher son statut et de savoir si elle représente un moteur social.

La sociologie via sa propre argumentation qui est bien souvent rhétorique afin de cacher maladroitement son absence de fondement réel, ne peut entraîner les personnes sensées et pas même la foule. La combinaison de l’absence de caractère prédictif et la volonté d’être technique empêche la création de l’impact social. Elle peut certes amener à poser des problèmatiques sociales mais non résoudre des problèmes. De plus sa technicité représente un obstacle pour la vision et plus précisément pour le rêve, en particulier si ce dernier doit être collectif pour amener un changement réel. Elle vit dans le domaine de l'”a posteriori”.

A l’opposé de la sociologie qui étudie la réalité, nous avons la mythologie. Celle-ci après la perte d’une dimension religieuse, en tant que vestige mental représente un “créateur de réalités”. Via son caractère diachronique elle active des schémas mentaux qui sont susceptibles d’engendrer la prise de conscience d’une certaine forme de continuité et via cela l’appartenance à une certaine catégorie dans le sens large du terme. Ainsi elle permet de regrouper naturellement des personnes qui n’ont essentiellement qu’elle comme véritable point commun. Elle sert donc d’une part de noyau de la structure et d’autre part de germe qui engendre la catégorie. Et c’est en ce sens que nous pouvons parler de moteur social.

La mythologie n’est pas seulement l’essentiel de l’histoire ni une créatrice de réalités, elle est aussi la mémoire du futur dans le sens où elle transforme l’utopie. Ce qui est impossible pour une réalité du moment, peut aisément être un élément de la mythologie. Ainsi la mythologie peut servir de guide à celui qui ne voit que l’horizon. De plus par son caractère unificateur, elle peut engendrer des phénomènes de masse et transformer la société aussi bien sur le plan politique que géopolitique. Dans l’histoire contemporaine, nous avons des exemples flagrants de la puissance de la mythologie en tant que moteur social. Sans la mythologie, la résistance ne serait pas née car la réalité était à l’époque contre toute forme de résistance. Il fallait être irréaliste pour devenir résistant, il fallait croire en l’impossible et seule la mythologie unificatrice qui regroupe l’essentiel de l’histoire pouvait servir de support à la génération de ce schéma mental.