731 - Du dogme à la modification

N. Lygeros

Le problème général de la modification peut être analysé au sein de la problématique de la décision stratégique. Celle-ci qui précède toute action tactique, doit être au centre de l’appareil logistique qui prépare la modification. Ainsi la modification se situe nécessairement dans le dogme qui constitue le cadre noétique de la praxéologie. Dans cette note, nous voulons suggérer quelques remarques dans le cas générique, d’une modification dépendant de plusieurs personnes. Celles-ci peuvent être réunies de manière collégiale ou intermédiaire via une hiérarchie, cela importe peu. L’essentiel est dans le transport de structure qui lie la décision à la modification.
Pour traiter la modification dans le cadre défini précédemment nous considérons le modèle du champ. Ce dernier est découpé en deux : un champ intérieur à la structure décisionnelle et un champ extérieur à celle-ci. Il est clair que le changement de phase qui intervient dans le passage intérieur-extérieur via l’effet de bord, est particulièrement délicat aussi nous le traiterons à part. Le champ intérieur est entièrement plongé dans le dogme et peut être considéré comme lisse dans le cadre classique où il n’existe pas de taupe dans le système décisionnel. Sinon celle-ci est interprétée comme un champ extérieur enclavé. Par contre le champ intérieur n’est pas nécessairement homogène puisque les différentes composantes de la structure n’ont pas la même vitesse de traitement de l’information. Ces vitesses différentes peuvent générer des perturbations ou des engagements de la modification interne. De plus malgré l’omniprésence du dogme, les interprétations individuelles fluctuent que ce soit de manière passive ou active, aussi il est nécessaire d’activer une vague de redondance afin de stabiliser le système et de le rendre cohérent.

Le champ extérieur est quant à lui a priori indépendant de l’influence directe du dogme, mais n’a pas de sens sans ce dernier en stratégie moderne. En effet, l’impact de la modification en milieu totalement hostile est pour ainsi dire aléatoire et en tout cas non contrôlable efficacement. Le champ de la modification a donc besoin d’un support qui ne peut être que le dogme. L’appareil logistique doit donc préparer ce support afin d’augmenter l’impact de la modification. Il est d’ailleurs possible dans le cadre d’un jeu de guerre positionnel que toute la complexité du système soit incluse dans cette préparation et que la modification apportée ne soit que mineure par rapport à l’ensemble des opérations. Le champ extérieur représente ainsi une sorte de zone tampon entre le milieu hostile et le milieu amical. Et l’intrusion ennemie dans cette zone doit être amoindrie si nous ne voulons pas qu’elle se transforme en véritable attaque. En ce qui concerne la jonction de deux champs, il est sans doute difficile de définir la frontière avec exactitude car il est évident que nous sommes aussi en présence d’un phénomène de percolation. Ce dernier doit néanmoins être exploité afin de lisser le plus possible le changement de phase car il est bien sûr fondamental que ce dernier soit le plus discret possible pour le monde extérieur. Si l’impact est trop brutal au moment de son arrivée dans la zone-tampon, il peut transformer celle-ci en milieu hostile avant d’avoir pu déployer sa puissance de transformation. Aussi les individus qui sont présents à la jonction intérieur-extérieur doivent être choisis avec précision car ils représentent une sorte de noyau délocalisé. Ils sont donc tout aussi importants que le noyau proprement dit mais par nature plus fragiles puisqu’ils sont exposés à plus de dangers. Leur robustesse globale sera donc traitée avec soin afin de renforcer la structure globale du système décisionnel considéré.

Enfin pour relier l’ensemble de ces composantes i.e. champ intérieur en milieu amical, champ extérieur en zone tampon et jonction du changement de phase, un processus de feedback efficace doit être préétabli avant la mise en route du dispositif de la modification. Ce processus doit traverser l’ensemble de la structure pour assurer d’une part son auto-cohérence et d’autre part son potentiel en matière de modification extérieure car le système doit évoluer au sein de ses propres modifications.