648 - De l’effondrement gravitationnel à l’effondrement du modèle

N. Lygeros

Dans le cadre de la physique classique au sens de Newton, il existe un modèle cognitif qui est considéré élementaire sinon évident. Dans cet article nous voulons mettre en évidence ses faiblesses intrinsèques. Il s’agit plus précisemment de l’exploitation de la notion de barycentre. Nous avions indiqué dans un précédent article que celle-ci faisait apparaître le problème de l’action à distance, mais cette fois comme nous allons le voir notre critique est plus profonde.

Considérons une masse sphérique dans un espace vide et calculons le champ gravitationnel qu’elle émet. Si nous nous plaçons dans le cadre de la relativité générale, nous segmentons les calculs en trois phases. Plus explicitement nous calculons le champ au sein de la sphère, puis à l’extérieur, et enfin nous recollons les solutions. Tandis que dans le cadre de la physique classique, nous ramenons toute la masse de la sphère à son barycentre et nous effectuons un calcul unique. Cependant ce n’est pas vraiment cette différence qui nous préoccupe ici, mais si elle ne sera pas sans conséquence sur notre problèmatique.

Le problème que nous voulons mettre en évidence provient de l’effondrement gravitationnel, et en particulier de l’existence du rayon de Schwartzschild. En effet via ce dernier que nous savons associer à toute masse, nous savons que toute masse qui se retrouverait au sein de la sphère définie par ce rayon se transformerait inexorablement en trou noir car aucune des autres forces ne pourrait résister à celle de la gravitation. Nous avons donc un problème de densité critique.

Or, dans la transformation newtonnienne que nous effectuons sur la masse sphérique, en la ramenant à son barycentre, nous faisons apparaître une densité infinie. En effet puisque la masse-énergie de la sphère est finie et qu’elle est ramenée à un volume nul, la densité est infinie. Celle-ci n’est pas nécessaire pour notre démonstration puisqu’il suffit qu’elle dépasse celle définie par le rayon de Schwartzschild. Cependant lorsque nous utilisons l’isomorphisme cognitif entre la masse sphérique et le barycentre, nous traversons nécessairement cette frontière et il apparait alors le changement de phase qui transforme la masse sphérique en trou noir. Ainsi en d’autres termes nous parvenons au résultat surprenant suivant : si nous voulons utiliser la notion de barycentre lors d’un calcul de type gravitationnel nous parvenons ici à démontrer que toute masse sphérique est équivalente à un trou noir. Même si cela pourrait avoir un sens si nous restions strictement au niveau gravitationnel et dans le cadre classique, du point de vue de la relativité générale, nous avons une différence fondamentale. Puisque dans le cas d’une masse sphérique, nous n’avons qu’une déformation du continuum de l’espace-temps, tandis que dans celui du trou noir il s’agit d’une véritable déchirure. Aussi sur le plan de l’information l’équivalence est invalide.

Nous venons donc de montrer via l’effondrement gravitationnel, l’effondrement du modèle cognitif qui semblait initialement élémentaire sinon évident. Cela nous permet non seulement d’affirmer la nécessaire étendue de la masse en relativité générale mais aussi que l’utilisation abusive de la notion de barycentre en physique est extrêmement dangereuse. Ce danger provient du fait qu’il a une interférence avec la nature intrinsèque du continuum de l’espace-temps et du modèle que nous associons à celui-ci dans notre intuition physique. En effet, cela revient à poser la question de l’existence de point en physique et de son sens. Car quel sens physique associer à l’opération qui consiste à priver une sphère compacte d’un point de sa surface ? Ainsi même si le modèle mathématique parvient via sa simplicité et son efficacité à résoudre un problème physique, cela ne signifie pas nécessairement qu’il doit être identifié à la réalité phénoménologique. Il est avant tout un moyen ad hoc de résoudre et parfois il n’est rien de plus. Le modèle est plus puissant que la réalité car il vit dans le mental, c’est en réalisant cela que nous parviendrons mieux à comprendre ce que nous désignons par réalité.