1442 - Diplomatie, politique et stratégie

N. Lygeros

La difficulté principale qui existe dans un cadre conflictuel, provient en général de l’absence de coordinations des trois composantes constituées par la diplomatie, la politique, et la stratégie. La diplomatie dépend directement de la politique mais pas du système électoral aussi elle se trouve dans une situation paradoxale qui provoque chez elle un équilibre instable. Tandis que la politique qui détient le véritable pouvoir est complètement dépendante de la notion de coût en raison justement des élections. Elle est stable mais déséquilibrée. Enfin, la stratégie est quant à elle hors équilibre. C’est aussi pour cette raison qu’elle est la plus créative en matière de résolution de problème. Seulement elle n’a pas le dernier mot en matière de discussion. Aussi tout le travail doit être effectué en amont avec des solutions robustes afin de supporter les modifications inévitables engendrées par les contraintes politiques et diplomatiques. Ces dernières obéissent à une logique linéaire qui ne permet pas l’exploitation du paradoxe qui est l’essence même de la stratégie. Ainsi il est théoriquement impossible d’obtenir la convergence des contraintes à ce niveau. Car il ne s’agit pas seulement de trouver des compromis mais des solutions réelles. Aussi, nous sommes en dehors du cadre des processus de cohabitation. La politique dépend quasi-exclusivement du consensus de masse aussi elle ne peut que rarement appliquer des principes stratégiques. Quant à la diplomatie, elle se contente malheureusement bien souvent de ne pas gêner la politique intérieure alors que son but concerne la politique extérieure. Aussi dans un cadre conflictuel qui ne correspond pas à une période de guerre, le stratège doit préparer doublement son objectif s’il désire vraiment que celui-ci soit réalisé malgré l’intervention de la diplomatie et de la politique. La conséquence de ceci, c’est que ce cas de figure est lui aussi rare.

Dans le cadre de la question orientale, nous pouvons constater in vivo cette difficulté au sein de l’Union Européenne, puisque nous sommes obligés de subir des contraintes artificielles qui proviennent de la crainte d’avoir un coût politique et des tensions diplomatiques. La réalité de la situation c’est que ces deux domaines sont plus aptes à traiter des situations normales que conflictuelles. Alors que la stratégie représente la pensée dans le champ de bataille. Les tensions et les pressions sont inhérentes à son existence. L’important c’est donc dans ce cadre la diffusion du dogme stratégique européen qui est le seul qui soit capable de lutter contre les visées de la Turquie. De plus, les critères de convergence même s’ils appartiennent au domaine politique peuvent sous l’action de la grande stratégie, obtenir des résultats efficaces même dans des situations conflictuelles délicates. Mais l’essence du problème n’apparaît que dans les situations critiques où s’opère un changement de phase, car dans ces cas, il ne reste que les schémas mentaux de la stratégie pour transcender le choc.