761 - Ludwig II

N. Lygeros

 

(Tous les personnages regardent avec curiosité un personnage muet. Ce dernier pourrait être Ludwig mais nous n’en savons rien.)

Philippe : C’est vrai qu’il ne dit rien…

Martine : C’est bien ce que je disais !

Anne-Marie : Il semble si triste…

Rémi : Et si seul.

Yoann : Pourtant, nous sommes là… (Un temps.) Nous sommes avec lui.

Patrice : Peut-être que nous ne sommes qu’avec lui sans être auprès de lui…

Philippe : Je voudrais être auprès de lui.

(Ils s’approchent tous du personnage qui demeure muet.)

Rémi : Notre présence ne le dérange pas en tout cas.

Yoann : Peut-être que notre absence le dérangerait encore moins…

Martine : Comment peux-tu être si dur ?

Yoann : Je ne suis pas dur… J’ai l’impression de le comprendre.

Patrice : Seulement, nous avons tous cette impression.

Anne-Marie : Non ce n’est pas vrai… Pour ma part, je ne comprends que sa différence.

Martine : Au moins, je ne me sens plus seule…

Rémi : Le mime serait peut-être la solution.

Yoann : Le dictionnaire nouveau est arrivé !

Philippe : Tu crois que c’est vraiment le moment ?

Patrice : Il ne faut pas se précipiter vers une solution facile !

Rémi : Facile ? (Un temps.) Le mime, facile ? C’est vite dit !

Philippe : Je crois qu’il vaut mieux ne rien dire sur le mime. Après tout le mime ne dit rien non plus.

Rémi : Le mime dit le non-dit !

Martine : C’est peut-être le rôle de Ludwig !

Yoann : Tu veux dire, ne pas dire ce que nous disons ?

Patrice : (dubitatif) Cela et rien de plus ?

Philippe : Pourquoi donc le non-dit est-il si important ?

Martine : Sans doute en raison du silence.

Rémi : Le silence n’est pas tout.

Anne-Marie : Mais il englobe chaque parole… (Silence.)

(Le personnage fait un mouvement, un seul.)

Yoann : Je crois qu’il a bougé…

Patrice : En tout cas, il n’a rien dit.

Rémi : Il a peut-être dit le non-dit.

Martine : A travers le mime du silence.

Anne-Marie : Comme si la parole était le non silence.

Philippe : Je me demande si l’un d’entre vous a compris ce qu’il n’a pas dit…

Rémi : Je crois qu’il a mimé quelque chose.

Yoann : Tout mouvement n’est pas un mime.

Patrice : Comme toute parole n’a pas de sens.

Martine : Je ne sais pas si ce silence a un sens, mais j’aime l’entendre…

Anne-Marie : Il se dégage de ce silence une sorte de musicalité.

Philippe : Comme si les jeux du langage étaient musicaux.

Yoann : Les musiciens notent la durée du silence… Ils connaissent son importance.

Martine : Tout cela ne nous dit pas comment communiquer avec Ludwig…

Patrice : Cela n’est pas certain…

Rémi : Il y a peut-être une façon de faire…

Yoann : Tu en es sûr ?

Patrice : Rien n’est certain.

Philippe : Cela est sûr !

Martine : Alors ?

Anne-Marie : Faisons silence ! (Silence.)