439 - Remarques sur le modèle cognitif en psychologie

N. Lygeros

La psychologie bien que difficilement codifiable par nature n’a pas été insensible à l’introduction des sciences cognitives dans la sphère humaine. Les progrès effectifs des sciences cognitives dans la compréhension de notre système cérébral n’étant plus de simples suppositions ou extrapolations théoriques ont contraint les spécialistes à les considérer comme un véritable outil thérapeutique. Selon Beck, le modèle cognitif postule que la genèse des émotions et des comportements est tributaire de variables cognitives hiérarchisées en trois degrés. Il fonctionne donc comme une théorie à variables cachées plus ou moins profondes dont les observables seraient les émotions et les comportements.
Le premier degré des cognitions est celui des pensées automatiques qui sont pour ainsi dire des réflexes cognitifs si l’on accorde l’utilisation de cet oxymoron. Il s’agit plus simplement de nos réactions face aux stimuli de l’environnement lorsque nous traitons l’information. Cette interface est considérée comme neutre car elle n’est pas interprétative.

Le deuxième degré correspond justement à l’interprétation de ce traitement de l’information. C’est le domaine des distorsions cognitives i.e. inférences arbitraires, généralisations, personnalisations… Ce sont précisemment ces cognitions erronés et répétées que nous retrouvons dans des pathlogies telle que la dépression et l’anxiété. La surinterprétation des informations tend à les aliéner et modifie insidieusement la vision cognitive de l’univers pensé et vécu.

En réalité, les erreurs d’interprétations i.e. les distorsions cognitives sont elles-mêmes influencées par des schémas cognitifs qui représentent le troisième degré de la théorie de Beck. Ceux-ci sont élaborés au cours de notre évolution psycho-affective. Dans le cadre pathologique, ils correspondent à des pensées pessimistes qui influent grandement sur notre rapport avec nous-mêmes et notre environnement.

Naturellement les thérapies cognitives qui ont émergé des thérapies comportementales pour devenir une psychothérapie associée ou autonome, s’appuient sur le modèle cognitif. Et son représentant majeur est celle de Beck.

Une façon encore plus dure au sens scientifique du terme d’interpréter le modèle cognitif est de le placer dans le contexte mathématico-informatique. Dans ce cadre plus formel, les trois degrés de Beck correspondent respectivement à l’exécutable, au code et enfin au langage. L’exécutable est effectivement l’interface avec l’environnement, le monde extérieur qui fournit les données au programme. Il n’interprète en rien les données, il se contente de les utiliser. Cependant leur exploitation est gérée par le code qui peut comporter des erreurs plus ou moins graves mais qui ne sont plus simplement des erreurs de syntaxe puisque le code fonctionne. De même, celles-ci peuvent être dues au langage lui-même qui est soit trop libre dans son écriture, soit mal fondé sémantiquement. Pourtant autant il est classique de rechercher des erreurs possible dans le code autant il est rarrisime de s’interroger sur le bien fondé d’un langage. Néanmoins cette étape ultime est nécessaire pour comprendre complètement un problème. Et si nous avions en tête l’idée que la création d’un langage obéit aux mêmes règles que celle d’un code dans un langage donné et que cette création peut-être l’évolution d’un processus semblable à celui des algorithmes génétiques alors sa certification nous semblerait plus nécessaire.

L’acquisition des schémas cognitifs est sans doute le point le plus complexe du modèle car il dépend fortement de l’historique de l’individu. Une vision diachronique de celui-ci est donc nécessaire afin de voir ses émotions et son comportement comme les résultats d’une évolution semblable à celle d’algorithmes qui se sont adaptés au mieux à des situations données sans pour autant connaître la validité de cette adaptation en général.