912 - Sur le caractère global de l’axiome de reproduction

N. Lygeros

En généralisant la notion de groupe afin de créer celle d’hypergroupe, Frédéric Marty a fait bien plus qu’une simple opération classique. L’introduction de l’axiome de reproduction est le point central de cette nouvelle approche de la théorie puisque l’associativité était déjà présente. Notre habitude à traiter les groupes de manière globale ne met pas en évidence ses particularismes. L’un de ces particularismes est constitué par la présence de l’élément neutre. Il est vrai que ce dernier est souvent considéré comme un élément sans véritable intérêt pour le groupe alors qu’il est bien sûr fondamental pour la loi du groupe. Une façon de le constater c’est de mettre l’accent sur l’aspect projectif i.e. l’existence d’un élément qui vérifie a.a = a. En effet l’élément neutre vérifie nécessairement cette propriété aussi nous n’y prêtons pas suffisamment attention. Cependant ce fait représente l’ultraspécialisation de la caractéristique de l’élément simple (e) à savoir : xÎG nous avons x.e = e.x = x. Cette fois nous pouvons remarquer que bien que nous considérions le groupe de manière globale nous exploitons en réalité une propriété locale car dans la propriété énoncée l’élément neutre est l’unique élément à la vérifier. Ainsi si nous désirons donner au groupe toute sa dimension globale, nous devons pour ainsi dire délocaliser cette propriété. Et une des manières les plus élégantes de le faire, c’est d’introduire l’axiome de reproduction. Celui-ci se présente sous la forme suivante : xÎH nous avons x.H = H.x = H. Nous voyons donc que l’axiome de reproduction globalise le rôle de l’élément neutre. Sans rechercher à localiser l’information de l’opération, il introduit une hyperopération qui est globalement invariante quant à l’engendrement de la structure. Il généralise classiquement le x en le transformant en H et il modifie non classiquement le (e) afin d’accéder au (x). Par ce biais le groupe devenu hypergroupe perd le particularisme de la neutralité. Ainsi les éléments de l’hypergroupe sont potentiellement de même nature et ils ont tous une action. Dans cette optique-là, il est alors plus naturel de se différencier des hypergroupes cycliques qui ramènent par un autre biais le particularisme. Bien que ces derniers soient plus abordables par nature puisqu’ils constituent une généralisation classique de la cyclicité, il n’en demeure pas moins que nous considérons qu’ils n’appartiennent pas à la même mentation même s’ils remettent en cause pour certains l’implication spécifique aux groupes quant à la cyclicité et la commutativité. C’est pour cette raison que nous affirmons l’importance de la recherche à effectuer dans le domaine des hypergroupes non cycliques afin de mettre en évidence des propriétés plus profondes de l’axiome de reproduction. Aussi l’approche des P-hypergroupes même si elle permet d’obtenir des résultats intéressants n’aborde pas elle non plus de manière véritablement globale des entités qui le sont réellement, par nature. Même s’il existe une difficulté combinatoire pour aborder les hypergroupes dans leur ensemble ce n’est pas une raison suffisante pour spécialiser nos approches, mais au contraire une raison qui rend nécessaire le changement de phase. Les hypergroupes via le caractère global de l’axiome de reproduction constituent un véritable défi holistique pour notre pensée mathématique.