2449 - L’homme qui riait versus la société de l’intégration (dialogue)

N. Lygeros

– L’homme qui riait n’avait pas été défiguré par la vie.

– C’est vrai que c’est la société qui le voulait ainsi.

– Il n’avait a priori aucun problème.

– Et faute d’en avoir trouvé, la société lui en attribua un.

– Est-ce le prix à payer pour vivre libre ?

– Non, c’est la condamnation à subir pour avoir le droit d’être intégré.

– Quel est le sens de cette intégration ?

– Il ne concerne pas l’homme.

– Alors de quel droit la société l’a-elle condamné ?

– Du droit du plus fort.

– Ou celui de l’ignorant ?

– La société n’ignore pas ces hommes, elle les craint.

– Car elle ne peut pas les admirer.

– Les admirer reviendrait à rejeter son existence en tant que pouvoir.

– Et sans ce pouvoir que deviendrait-elle ?

– Plus humaine.

– C’est l’absurde de ce raisonnement.

– C’est la cause de la condamnation de l’homme qui riait.

– La vie est donc si lourde à porter ?

– Insupportable.

– C’est donc pour cela que les hommes se contentaient de sourire.

– Le sourire n’est qu’une esquisse.

– Tandis que le rire représente l’œuvre.

– La société supporte donc les esquisses.

– Car ce sont des œuvres inachevées.

– Tandis que les œuvres…

– Elle préfère les achever !