1484 - De l’extrême à l’optimal via la diversité

N. Lygeros

Dans le cadre de l’économie mais pas seulement il n’est pas surprenant de constater une certaine confusion entre les notions d’extrême et d’optimal. Une manière de mettre en évidence cette différence, c’est d’introduire la notion de robustesse. En effet en économie, une solution extrême est souvent instable car elle dépend fortement des conditions initiales du processus considéré. Ainsi dans le domaine des portefeuilles il est facile d’effectuer une optimisation locale et de miser sur la valeur la plus compétitive. Cependant même si la valeur espérée est élevée, la chance de l’obtenir est exponentiellement faible. Aussi c’est une autre approche qui est nécessaire et qui se base cette fois sur l’optimisation globale.

Le point de vue cette fois, c’est de tenir la route i.e. d’être présent sur le marché sans subir une faillite même après une série de succès. Nous retrouvons dans ce cadre, une mentalité chère à John Nash et à la théorie des jeux. En opposition avec l’approche de Von Neumann et Morgenstern, le cas extrême n’est plus traité car les gains peuvent être obtenus de manière globale et donc sans respecter les jeux à somme nulle. Il ne s’agit pas d’obtenir la meilleure solution possible mais la plus robuste. Ceci est possible grâce à la diversité. Celle-ci permet d’avoir un spectre d’actions plus grand qui autorise le balancement des gains mais avec des pertes. Car le but, c’est d’obtenir un gain en moyenne. L’approche n’est donc pas offensive mais elle demeure optimale dans le cadre général en raison de gains moyens. Elle se base sur le théorème de Kelly qui montre que la mise proportionnelle est une stratégie optimale. Fait encore plus surprenant qui provient de la puissance de la diversité, c’est que l’optimalité de la stratégie ne dépend pas des rapports. Quant à la caractérisation de Kuhn-Tucker, elle permet de rendre encore plus concrète la stratégie optimale car elle met en évidence la notion de log-optimalité qui exploite l’inégalité de Jensen et le lemme de Borel-Cantelli. Il existe donc un formalisme concret et puissant qui permet de démontrer l’efficacité de l’optimalité versus l’extrême et ceci grâce à l’indispensable diversité. Il est vrai que du point de vue de la théorie des jeux, ces résultats sont absolument naturels. Mais il est important de constater que cette approche n’est pas seulement théorique. Elle est aussi pratique et permet de créer un paradigme concret de la notion de portefeuille universel. Ce dernier en tant qu’aboutissement de l’appareil théorique rend compte de sa puissance dans le domaine financier. Ainsi nous retrouvons en économie une application des schémas mentaux de la stratégie, et nous démontrons que ces derniers sont d’autant plus robustes qu’ils sont utilisés de manière continue et intensive. Construits pour travailler dans la durée, ils codent plus les principes de guerre que ceux de bataille. D’où l’absence de nécessité d’un caractère offensif extrême. Cela montre aussi comment l’Union Européenne pourrait exploiter cette méthodologie dans un cadre qui est fondamental à sa survie à savoir son budget. Dans ce domaine les grandes dépendances ne valent rien. Seules les relations multiples parviennent à transcender les difficultés locales et obtenir à long terme de bons résultats.