1245 - Constitution européenne et conscience européenne

N. Lygeros

L’actuelle crise dans le processus de ratification de la Constitution européenne fait prendre conscience aux citoyens de l’Union Européenne du problème crucial de son statut. Indépendamment du résultat de certains référendums, il apparaît clairement que l’Europe est désormais une entité tangible et non une abstraction formelle. Ce qui n’existait qu’à travers la problématique des subventions devient enfin une préoccupation essentielle. L’enjeu de la Constitution Européenne n’est pas plus un simple débat interne de technocrates anonymes mais une véritable confrontation d’idées des peuples de l’Union Européenne. Cependant il ne faut pas se tromper, il ne s’agit aucunement d’un processus réduit à une problématique multinationale. Car l’Union ne peut être réduite à cela, du moins plus maintenant. Son évolution est une démonstration du principe qui interprète l’économie comme la dynamique de l’éthique. La Constitution Européenne est fondamentalement différente des autres traités. Il s’agit bien d’une volonté commune de changer de phase dans notre évolution en incorporant la Charte des droits fondamentaux i.e. la partie II du traité établissant la Constitution Européenne. Cette modification essentielle va dans le sens de la recherche d’une unité plus profonde. Elle est donc un medium principal quant à l’expression de la pensée européenne pour ne pas dire conscience. Cette pensée européenne qui se concrétise sur un texte permet d’avoir un point de référence à l’instar de la déclaration des droits de l’Homme, afin d’influencer sur le plan humain les modèles présents dans le monde et qui ne traite pas forcément l’homme de manière axiologique. Nous voyons dans ce texte une volonté affichée de transformer la personne anonyme en un être qui a des droits. Cela peut quelque peu surprendre des partenaires qui n’ont pas une philosophie axée dans ce sens. Et cela est une très bonne chose car nous ne pouvons plus nous contenter d’attendre passivement les résultats des travaux des organisations humanitaires et non gouvernementales. Nous devons prendre des initiatives dans ce domaine à l’instar de l’innovation qui a créé sur le plan international, le droit d’ingérence. Cette crise dont toutes les formes n’étaient pas nécessaires, car il y a aussi des risques de voir compromettre un projet pour de toutes autres questions et raisons, doit être utilisée non seulement pour être dépassée et nous voir grandir par la suite mais aussi pour que l’ensemble des citoyens européens soit sensibilisé par notre ontologie. Que voulons-nous devenir ? Que devons-nous être ? Telles sont désormais les questions que nous devons nous poser à travers les articles du traité pour l’établissement de la Constitution Européenne. En ce sens la Constitution sert de cadre catalytique pour une prise de conscience collective. Nous ne comprenons le terme européen que par opposition aux autres, désormais nous en définissons le sens du point de vue intrinsèque aussi les difficultés internes sont inhérentes à ce processus. Elles ne représentent pas pour autant une fin en soi comme certains pourraient le penser. Elles ne sont qu’une étape intermédiaire, dans cette nouvelle compréhension de notre nature européenne. Il faut donc les analyser pour les dépasser afin d’aller plus loin dans cette évolution nécessaire qui transforme l’existence en nécessité de créer.